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10 août 2015,
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« Tu es une incapable ! » « Tu ne sais même pas ranger la vaisselle ! » « Tu es inutile ! » «Tu es moche, tu ne ressembles à rien » : telles sont le type d’humiliations verbales qui précèdent et accompagnent généralement les violences physiques au sein du couple. S’installe alors l’angoisse permanente de mal faire : d’oublier d’acheter le paquet de cigarette, de mal ranger le sel, de trop sucrer son café, de le « provoquer ».

Chaque minute en France une femme subit des violences physiques ou sexuelles de la part de son conjoint. Toutes ne portent pas plainte. Il faut souvent des années et le coup de trop pour se décider à franchir le pas. Les hommes victimes de violence de la part de leur conjoint(e) sont encore plus réticents à porter plainte. Cet article s’adresse prioritairement aux femmes qui restent les principales victimes de violences conjugales mais les démarches décrites peuvent être entreprises sans considération du sexe de la victime et/ou de l’auteur des violences.

Les raisons qui font hésiter les victimes de violences conjugales à quitter celui qui les fait tant souffrir sont de différents ordres : psychologiques, sociales, financières,… Pourtant des solutions existent pour les aider à se protéger. Voici quelques réponses concrètes aux questions que se posent les victimes de violences conjugales :

Comment se passe le dépôt de plainte ?

Vous pouvez vous rendre au Commissariat de police ou à la Gendarmerie la plus proche de votre domicile pour porter plainte. Vous serez entendue par un policier ou un gendarme sur les faits de violences. Si vous portez des traces de coup, vous serez probablement examinée par un médecin légiste qui établira si les blessures que vous présentez sont compatibles avec les coups allégués. Il fixera ensuite le nombre de jour d’Incapacité Totale de Travail (même si vous n’avez pas d’activité professionnelle). N’hésitez pas à montrer aux policiers les photographies que vous avez pu prendre de vos blessures et les certificats médicaux que vous avez pu faire établir par votre médecin généraliste si vous en avez eu la possibilité. Essayez d’expliquer le plus précisément les faits (déclenchement de la dispute, contexte, ce que vous avez pu ressentir comme émotion lors des violences,…). Vous pouvez également évoquer les violences qui ont eu lieu dans le passé si tel a été le cas.

Que va-t-il se passer pour mon conjoint si je porte plainte ?

Votre conjoint pourra également être entendu par les services de police, probablement sous le régime de la garde à vue. A l’issue de la garde à vue, le Procureur de la République peut décider de poursuivre votre conjoint s’il estime que l’infraction est constituée. Votre conjoint peut être convoqué à une audience correctionnelle quelques mois après son audition ou passer devant le juge correctionnel à l’issue de sa garde à vue en audience de comparution immédiate.

J’ai peur de mon conjoint. S’il apprend que je porte plainte, il va s’en reprendre à moi. Que faire ?

Il est conseillé de se rapprocher d’un avocat qui pourra vous orienter, vous assister lors de l’audience correctionnelle et introduire une procédure devant le Juge des affaires familiales. Il pourra demander une interdiction de contact. Votre conjoint n’aura non seulement plus le droit de vous approcher mais ne pourra plus non plus vous téléphoner, envoyer des SMS ou du courrier. La violation de l’interdiction de contact constitue un délit qui peut être sanctionné par une peine de deux d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. Si vous craignez fortement un passage à l’acte de votre conjoint, vous pouvez demander à disposer d’un dispositif « femme en très grand danger » et vous voir attribuer un téléphone d’urgence. Il vous suffira alors d’appuyer sur une touche pour qu’une équipe de police se déplace très rapidement chez vous.

Où vais-je habiter ?

Assistée par votre avocat, vous pouvez demander l’attribution du domicile conjugal dans le cadre de la procédure d’ordonnance de protection devant le Juge aux affaires familiales. La procédure est très rapide (environ une semaine) par rapport à une procédure classique. L’ordonnance de protection est délivrée par le Juge s’il estime qu’il existe des raisons sérieuses de considérer comme vraisemblables la commission des faits de violence allégués et le danger auquel vous ou vos enfants êtes exposés. Il fixe des mesures provisoires pour une durée maximale de 6 mois. Elles peuvent être prolongées au-delà si, durant ce délai, une requête en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d’une requête relative à l’exercice de l’autorité parentale. Il convient donc d’introduire une telle procédure dans ce délai. Il est également possible de se voir attribuer un logement d’urgence.

Que va-t-il se passer pour les enfants ?

Les enfants sont souvent les seuls témoins des violences au sein du couple. Il convient de les protéger. L’ordonnance de protection pourra fixer les modalités de garde des enfants et notamment des visites médiatisées par l’intermédiaire d’une association. Les visites médiatisées présentent l’avantage d’éviter que les parents ne se croisent et d’encadrer les contacts du conjoint violent avec ses enfants par un professionnel.

Comment vais-je m’en sortir financièrement ?

Vous pourrez également demander dans le cadre de la procédure d’ordonnance de protection que votre conjoint soit condamné à vous payer une pension alimentaire ainsi qu’une contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants. Si vous disposez de faibles ressources, les frais d’avocat peuvent être pris en charge au titre de l’aide juridictionnelle ou éventuellement votre assurance protection juridique.

Est-ce utile de prendre un avocat ?

Dénoncer les faits de violences dont vous avez été victime nécessite beaucoup de courage et constitue la première étape pour mettre fin au cycle des violences. Dès lors que vous avez pris la décision de porter plainte, vous n’êtes plus obligée de faire route toute seule. Vous pouvez contacter un avocat qui vous conseillera et assistera :

Dans la procédure pénale, votre avocat :

 Vous assistera lors des éventuelles confrontations avec votre conjoint à l’hôtel de police ou à la gendarmerie,
 Aura accès au dossier pénal si les faits sont poursuivis et connaîtra la teneur de l’audition de votre conjoint par les forces de police,
 Vous assistera à l’audience correctionnelle,

Dans la procédure familiale, votre avocat :

 Pourra introduire une requête en ordonnance de protection et vous assister à l’audience,
 Pourra introduire une procédure de divorce ou de fixation des modalités de garde des enfants et vous assister à l’audience,

Devant le Juge des Enfants, votre avocat :

 Vous assistera dans le cas où une mesure d’assistance éducative serait ouverte.

Pour toutes autres précisions, vous pouvez nous contacter par téléphone ou par courrier électronique.
Anaïs FUCHS